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Tête à Tête – Emmanuel Legrand

Chargé du centre de ressources du VIP à Saint-Nazaire

Emmanuel Legrand — Artizest le blog de management culturel
Photo par Mr Timmy – PhotoLoireAtlantique.com

Le VIP est une scène de musiques actuelles (SMAC) située à Saint-Nazaire. Au delà des salles de concert et des studios de répétitions, le VIP compte aussi un centre de ressources doté d’un fond documentaire et d’un service d’accompagnement pour les projets liés à la musique.

Quelles sont tes responsabilités, en quoi consiste ton travail ?

En tant que chargé du centre de ressources du VIP, mon travail consiste à rendre notre fond documentaire accessible au plus grand nombre. J’assiste également la coordination des opérations thématiques: les conférences, mais aussi les diffusions de documentaires et films, les débats et les tables rondes. Par exemple, pour le U Rampe Sonore de 20syl (Décembre 2015), nous avons diffusé plusieurs documentaires au sujet du skate : Derrière le mur, la Californie de Marten Persiel (2012), et  Skateboard stories de Thomas Lallier (2011).

Les projets d’accompagnement représentent également une grosse partie de mon travail : j’accompagne les musiciens sur tout ce qui n’est pas la musique per se. Qu’est ce qu’une association ? Comment fonctionne la SACEM ? Comme je n’ai pas réponse à tout, mon boulot c’est aussi de rediriger ces personnes vers des collègues plus aptes à répondre à leurs questions.

Enfin, j’assure un travail important de réseau qui consiste à faire circuler l’information auprès des acteurs de la musique actuelle sur la région nazairienne. Je suis chargé de récupérer l’actualité des groupes et musiciens et de la diffuser. Inversement, je suis aussi là pour les informer: si un nouveau café-concert a ouvert, s’il existe un nouveau système de financement, par exemple.

Comment es tu arrivé à ce poste ? Quelle a été ta trajectoire ?

J’ai commencé par des études d’histoire. En parallèle, j’ai toujours aimé la musique. A la fac de Nantes où j’étudiais, il s’est créé une radio associative : Prun’. Avec deux potes on a lancé une émission. Ca s’est bien passé et j’ai fini par arrêter la fac pour m’investir dans la radio. J’ai décroché une formation à la Chambre de Commerce et d’Industrie, organisée par la ville de Nantes. Je me suis arrangé pour effectuer mon stage à la radio, et coup de bol, juste avant la fin de la formation, une nana qui bossait à la radio est partie. Un poste s’est donc libéré et j’ai été embauché en emploi jeune. C’était en 2001. Beaucoup de gens qui travaillent aujourd’hui en milieu associatif ont commencé avec ce type d’emploi là.

La radio s’est développée et je me suis retrouvé responsable d’antenne du pôle nazairien. On avait une fréquence temporaire ; il fallait renvoyer un dossier au CSA tous les six mois, c’était un peu une gymnastique mais ça fonctionnait. En 2007 est arrivé une remise à plat de toutes les fréquences FM du territoire national. On a candidaté pour des fréquences permanentes, mais ça n’a pas marché. J’étais un peu fatigué et j’avais envie de changement donc j’ai secondé un copain qui avait monté une association de spectacles en théâtre et danse. En parallèle, je travaillais en tant que tourneur et administrateur pour quelques groupes Nantais. C’était un peu fluctuant en terme d’activités. J’ai bricolé, j’ai fait de l’intérim, et puis certains projets se sont arrêtés. C’était un peu précaire mais super intéressant.

Et puis en 2010, mon prédécesseur au VIP est parti. J’ai candidaté et j’ai été pris. Je connaissais les gens du VIP parce que j’avais bossé avec eux sur des projets.

Ton pire job ?

Déménageur. En soit c’était pas le pire mais c’était difficile.

Le meilleur conseil qu’on t’aie donné ou la meilleure leçon que tu aies apprise ?

C’était un conseil sans l’être que j’ai reçu d’Amandine Ciappa, la présidente de Prun’. C’est quelqu’un pour qui j’ai une grande admiration : elle est très volontaire. Ca n’est pas toujours facile, il faut suivre, mais j’ai été marqué par sa ténacité. C’est vraiment quelque chose que j’ai retenu : qu’il faut s’accrocher.

Si tu devais te donner un conseil professionnel le jour de tes 25 ans ?

Peut-être de me dépêcher un peu plus de savoir ce que je voulais faire. Cependant je ne regrette rien : j’ai passé pas mal de temps à la fac et c’était chouette. Je n’ai pas perdu de temps dans le sens où j’ai rencontré des gens et appris des choses. Néanmoins, j’aurais pu faire plus à l’époque. Je n’ai rien loupé mais je me suis peut-être privé de certaines opportunités.

Quel autre job aurais-tu aimé faire ?

Dans la musique il y en a certainement d’autres parce que c’est un milieu que j’adore. En dehors de la musique j’aurais certainement aimé bosser autour du voyage. Pas forcément en agence de voyages, mais un job qui me permet de voyager.

Un rêve professionnel qu’il te reste à réaliser ?

J’aimerais organiser un festival. Depuis trois ans j’assiste au festival  Yeah  dans le Vaucluse, qui rassemble 500 personnes dans un château. En tant que spectateur, les gros festivals ça me gonfle. Là, c’est petit, c’est chouette, c’est généreux et le cadre est sublime. Donc si un jour je trouve le cadre, j’aimerais faire quelque chose dans ce genre. Le style de musique n’est pas important. Pour moi c’est vraiment l’endroit qui compte.

Quels sont les changements que tu aimerais voir dans ton secteur d’activité ? Comment pourrait-on innover ?

Là où il pourrait y avoir du changement c’est sur la circulation des artistes. On reçoit des musiciens et on en accompagne également en tournée. Ce n’est pas facile en France et encore moins à l’étranger. Ca commence à bouger mais ca reste un défi. En fait d’un pays à l’autre on ne se connaît pas bien en termes de fonctionnement et de structures.

Ensuite, tout ce qui concerne les arts numériques, à mon avis, est encore à développer. J’ai l’impression que ça tourne un peu en rond et je suis surpris parce qu’on voit parfois des trucs techniquement fabuleux mais pas toujours accompagné d’un vrai propos artistique.

Un conseil pour les lecteurs intéressés par cette voie professionnelle ?

Le monde des SMAC, et je pense de la culture en général, c’est du réseau, du réseau, et du réseau. Les compétences et la rigueur c’est bien, mais le réseau c’est l’essentiel. Et le réseau ça n’est pas du piston : c’est connaître et être reconnu. C’est savoir à qui m’adresser, qu’on sache qui je suis, et ce que je suis capable de faire. C’est primordial.

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